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L’autoconsommation, nouvelle frontière de l’énergie



Pour les ménages français, produire et consommer sa propre électricité devient une réalité. Le phénomène est encore marginal, mais il est appelé à se développer. Pour les énergéticiens, cela implique une double révolution : culturelle et numérique.

Grâce à la baisse des coûts des panneaux solaires et l'irruption du digital dans le secteur de l'énergie, produire et consommer sa propre électricité devient une réalité pour un nombre croissant de ménages français - plus de 14.000 à ce jour d'après Enedis. En comparaison des 28 millions de ménages français, le phénomène demeure à ce jour marginal - il n'en porte pas moins les germes d'une révolution à venir pour le secteur énergétique.

Depuis une décennie, les innovations se multiplient dans l'énergie et de nouvelles technologies se développent : le photovoltaïque est devenu une technologie mature, compétitive dans de nombreux pays , et qui contribue chaque jour à réduire les émissions de gaz à effet de serre. Cette évolution a déjà des conséquences sur les mix énergétiques nationaux, et elle amène également les acteurs du secteur à modifier leurs stratégies et leurs investissements.

Une évolution qui touche l'ensemble du secteur

Pour autant, ces nouvelles technologies de production n'ont pas bouleversé le système préexistant, car les parcs renouvelables, par leur taille, demeurent néanmoins des moyens de production centralisés ; la chaîne de valeur traditionnelle du secteur, très verticale, de la production au transport, puis à la distribution et enfin à la commercialisation, n'est donc pas ou peu modifiée, seul l'amont du secteur est affecté.

Avec l'autoconsommation, tout change : le client devient producteur et le réseau doit se transformer pour accueillir non plus quelques dizaines de sites de production, mais des dizaines, voire des centaines de milliers. Avec un tel changement d'échelle, c'est l'ensemble du secteur électrique qui doit évoluer.

Il ne s'agit plus «seulement» d'injecter de l'électricité sur le réseau pour répondre à une demande inflexible et lointaine, mais d'être capable d'agir à la fois sur le couple production-consommation au plus près du client en analysant les modes de vie et les usages d'énergie dans la maison afin de piloter l'équilibre du système au niveau local.

L'autoconsommation implique donc pour les énergéticiens une double révolution : culturelle, pour placer leurs clients et l'optimisation locale du système au coeur de leur stratégie d'entreprise, et numérique, car ce changement de focale ne sera possible qu'au prix de la digitalisation et de la plongée dans le «Smart Data». Cette digitalisation, condition nécessaire à la gestion d'un système décentralisé, va favoriser la propriété privée des moyens de production d'électricité par les clients. Cela répond à une réelle évolution sociétale, d'ailleurs paradoxale, puisque, dans les autres secteurs, la révolution digitale a plutôt favorisé l'avènement d'une économie collaborative , incitant les consommateurs à privilégier l'usage à la propriété (Uber, Netflix, BlaBlaCar...).

Vers une hybridation du système

La digitalisation sera d'autant plus importante que les clients-producteurs ne se couperont pas du réseau : sauf révolution technologique dans le stockage d'électricité, l'autonomie énergétique restera pour la plupart des consommateurs une chimère.

Ils continueront à bénéficier du service rendu par le réseau à titre «d'assurance» pour les jours sans soleil et comme un moyen d'écouler et de valoriser la production locale d'électricité dont ils n'ont pas l'usage. L'autoconsommation n'a donc pas vocation à remplacer le système existant mais plutôt à l'hybrider, à le complexifier.

Et demain ? Avec l'autoconsommation, des relations horizontales vont apparaître au sein d'un secteur historiquement très vertical : devenus producteurs d'électricité et acteurs de leur consommation, les clients s'apercevront très vite de l'intérêt de revendre leur électricité à des tiers ou de créer des «communautés énergétiques» locales pour mutualiser leurs productions et leurs consommations.

La mise en place récente d'un cadre réglementaire favorable ouvre la voie en France à de premières expérimentations d'autoconsommation «collective». L'objectif est de partager l'installation d'un kit photovoltaïque et la production d'électricité à l'échelle d'un immeuble, d'un habitat collectif, voire d'un écoquartier.

Le développement de l'autoconsommation collective permettra d'introduire cette fameuse dimension collaborative dans le secteur de l'énergie. Il imposera également de répondre à des questions juridiques, techniques et économiques complexes : comment partager les coûts et les bénéfices entre des clients n'ayant ni le même profil, ni la même consommation ?

Il est évidemment trop tôt pour mesurer les conséquences du développement de l'autoconsommation sur le secteur électrique. Une restructuration profonde de la chaîne de valeur semble néanmoins inévitable, de même qu'un bouleversement du paysage concurrentiel. Sans trop de risque, on peut penser que, à l'image d'autres secteurs ayant déjà vécu une telle révolution, les entreprises gagnantes seront celles qui se positionneront comme des acteurs de ce mouvement.

Extrait des Echos du 14/08/2017


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